Une diminution record des émissions en Europe en 2023
L’année 2023 marque une étape significative dans la lutte contre le changement climatique en Europe. Selon un récent rapport de l’Agence européenne de l’environnement (AEE), les émissions de gaz à effet de serre dans l’Union européenne ont diminué de 8,3 % par rapport à l’année précédente, réalisant ainsi une des plus fortes baisses depuis des décennies. Ce recul, d’autant plus notable qu’il s’opère dans un contexte de reprise post-Covid, résulte principalement de l’expansion des énergies renouvelables et de la réduction de l’utilisation du charbon.
Par rapport à 1990, les émissions ont chuté de 37 %, tandis que le PIB européen a augmenté de 68 %. Cette performance montre une avancée vers le « découplage » tant recherché entre croissance économique et émissions polluantes. La réduction est particulièrement visible dans les secteurs de l’électricité et du chauffage, où les énergies fossiles reculent au profit des sources renouvelables comme l’éolien et le solaire. En 2023, les énergies renouvelables représentaient 44,7 % de la production d’électricité dans l’UE, contre 32,5 % d’électricité produite par les énergies fossiles, et 22,8 % par les centrales nucléaires.
Les renouvelables en croissance mais des disparités persistantes
La forte croissance des énergies renouvelables est un levier essentiel pour la transition énergétique en Europe. Depuis 2005, leur part dans le mix énergétique a plus que doublé, passant de 10,2 % à 24 % en 2023. Cette évolution soutenue, encouragée par les mesures de soutien aux technologies propres, a permis de réduire la part du charbon, l’une des sources d’énergie les plus polluantes, et de favoriser une baisse de 24 % des émissions dans les secteurs de l’électricité et du chauffage en une seule année.
Cependant, cette transition vers un mix énergétique décarboné reste hétérogène selon les pays membres. Certains pays, disposant de ressources naturelles ou d’infrastructures adaptées, comme l’éolien dans les régions côtières, sont davantage en mesure d’adopter les renouvelables. À l’inverse, d’autres pays européens demeurent encore dépendants des énergies fossiles, ce qui limite leur capacité à réduire leurs émissions de manière significative.
Objectifs ambitieux pour 2030 et au-delà : entre espoir et incertitudes
En ligne avec son objectif de neutralité carbone en 2050, l’UE prévoit de réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030. Les prévisions actuelles, basées sur les politiques en place, estiment une réduction de 43 % par rapport au niveau de 1990, et des mesures supplémentaires, envisagées mais pas encore déployées, pourraient permettre d’atteindre 49 % d’ici la fin de la décennie. Cependant, il reste du chemin à parcourir pour combler l’écart avec l’objectif de 55 % fixé par la législation européenne.
Par ailleurs, le Parlement européen soulève des interrogations quant à la pérennité de ces ambitions climatiques. En effet, certains députés de droite, notamment, estiment que le cap des 90 % de réduction d’ici 2040, proposé pour la prochaine décennie, est « extrêmement ambitieux » et nécessiterait un dialogue étendu avec les parties prenantes pour en évaluer la faisabilité.
Une urgence climatique mondiale qui relativise les efforts européens
Si les avancées de l’UE sont indéniables, elles ne masquent pas la gravité de la situation à l’échelle mondiale. En dépit des efforts européens, les émissions mondiales ont continué à croître en 2023 (+1,3 %), en grande partie à cause de l’augmentation des rejets de gaz à effet de serre de la Chine (+5,2 %) et de la persistance des niveaux d’émission aux États-Unis. Avec 16 000 mégatonnes d’équivalent CO2 pour la Chine et 6 000 pour les États-Unis, l’empreinte carbone de l’Europe, qui rejette environ 3 200 mégatonnes, semble relativement modeste.
La poursuite des politiques actuelles, selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), risque de conduire à un réchauffement global de 3,1 °C d’ici à 2100, soit bien au-delà de la limite de 1,5 °C visée par l’Accord de Paris. Dans ce contexte, les efforts de l’Europe apparaissent exemplaires mais insuffisants à infléchir de manière décisive la trajectoire climatique mondiale.
La réduction des émissions de gaz à effet de serre en Europe est un signal encourageant pour la lutte contre le changement climatique, mais les enjeux restent colossaux. L’UE avance sur son chemin vers la neutralité carbone et montre que croissance économique et baisse des émissions peuvent coexister. Cependant, l’urgence d’une action concertée à l’échelle mondiale est plus que jamais cruciale, afin d’éviter un réchauffement aux conséquences catastrophiques.
Ainsi, alors que l’Europe continue de tracer sa voie, la COP29 à venir sera une nouvelle occasion de rappeler aux autres grandes puissances économiques l’importance de s’engager fermement pour un avenir plus durable et plus responsable.