Depuis plusieurs semaines, les prix du gaz en Europe connaissent une envolée spectaculaire. Après quatre semaines consécutives de hausse, le contrat à terme du TTF néerlandais, principal indice de référence pour le gaz naturel en Europe, a atteint 58,6 euros par mégawattheure (MWh). Cette augmentation représente une progression de 15 % depuis le début de l’année et un doublement des prix sur un an. Plusieurs facteurs expliquent cette tendance haussière marquée, parmi lesquels un hiver rigoureux, des stocks en forte diminution et des tensions géopolitiques qui menacent l’approvisionnement énergétique du continent.
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Des températures glaciales qui accentuent la demande
L’un des principaux moteurs de cette flambée des prix réside dans les conditions météorologiques. L’Europe du Nord-Ouest traverse actuellement un hiver particulièrement froid, entraînant une hausse significative de la consommation de gaz pour le chauffage. Cette demande accrue exerce une pression supplémentaire sur des stocks déjà fragilisés.
D’après les données de l’Association européenne pour le stockage du gaz (GIE), les réserves de gaz en Europe sont actuellement remplies à 49 %, contre 67 % à la même période en 2024. Dans certains pays comme la France, les Pays-Bas et la Croatie, ces stocks sont même descendus sous la barre des 35 %. Un tel niveau de stockage, bien inférieur aux standards des années précédentes, rend l’Europe particulièrement vulnérable aux variations de l’offre et de la demande.
Une diminution des importations russes et des tensions géopolitiques
Un autre facteur aggravant est la baisse des importations de gaz en provenance de Russie. Depuis le 1er janvier 2025, l’Ukraine a cessé d’autoriser le transit du gaz russe sur son territoire, réduisant ainsi encore davantage l’approvisionnement du continent européen. Cette décision s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu, alors que l’Union européenne a progressivement réduit sa dépendance au gaz russe depuis le début de la guerre en Ukraine en 2022. La part du gaz russe transporté par gazoduc dans les importations européennes est passée de 40 % en 2021 à environ 5 % fin 2024.
Pour compenser cette perte, l’Europe tente d’attirer davantage de cargaisons de gaz naturel liquéfié (GNL). Toutefois, cette stratégie s’avère coûteuse, d’autant plus que l’Asie, elle aussi confrontée à des vagues de froid, est un concurrent direct pour ces ressources. Cette rivalité entre acheteurs européens et asiatiques contribue elle aussi à la hausse des prix sur le marché mondial du GNL.
Un marché sous pression face aux sanctions américaines
Outre les contraintes météorologiques et géopolitiques, un autre élément pourrait venir perturber encore davantage les marchés de l’énergie : la politique commerciale des États-Unis. Le président américain a récemment annoncé son intention d’imposer des droits de douane de 25 % sur l’acier et l’aluminium, ce qui pourrait entraîner une escalade des mesures de rétorsion entre l’Europe et les États-Unis.
Or, l’Europe est fortement dépendante du GNL américain, qui représente environ 19 % de ses importations de gaz. Toute détérioration des relations commerciales transatlantiques pourrait renchérir les coûts d’approvisionnement et prolonger la tendance haussière des prix. Selon les analystes de DNB Markets, les importations de GNL resteront élevées dans les mois à venir, car les niveaux actuels de stockage sont insuffisants pour assurer l’équilibre du marché et préparer l’hiver prochain.
Vers une stabilisation des prix ?
Malgré cette flambée des prix, certains experts estiment que des facteurs de stabilisation pourraient entrer en jeu à moyen et long terme. La fin de la guerre en Ukraine et l’augmentation des capacités de production aux États-Unis pourraient permettre d’atténuer la pression sur les marchés. Si les projets d’exportation de GNL américains se concrétisent, la capacité d’approvisionnement mondiale pourrait quasiment doubler d’ici à 2030, offrant ainsi un répit aux consommateurs européens.
Néanmoins, à court terme, la tendance reste incertaine. Les prévisions météorologiques pour les prochaines semaines restent un élément clé : un hiver plus rigoureux que prévu pourrait encore accentuer la demande et creuser le déficit des stocks. Par ailleurs, la stratégie des pays européens pour reconstituer leurs réserves d’ici l’hiver 2025-2026 jouera un rôle déterminant dans l’évolution des prix du gaz.
Le marché du gaz en Europe traverse une période de forte volatilité, marquée par une combinaison de facteurs climatiques, géopolitiques et économiques. L’épuisement des stocks et la concurrence accrue pour le GNL ont conduit à une hausse significative des prix, plaçant les professionnels face à des coûts énergétiques plus élevés. Face à ces incertitudes, il est essentiel pour les entreprises de suivre de près l’évolution du marché et d’adopter des stratégies adaptées pour optimiser leurs contrats d’énergie.