CO2 : quel est l’impact du marché carbone sur le prix de l’électricité ?

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Un des principaux facteurs de variation des prix de l’électricité est le marché carbone européen. Mais comment fonctionne ce marché ? Pourquoi le prix du CO2 influe-t-il directement sur le coût de l’électricité ? Explications.

Créé en 2005 dans le cadre de la politique climat de l’Union Européenne, le marché carbone repose sur le principe du pollueur-payeur. Il vise à réduire les gaz à effet de serre (GES) en fixant un plafond d’émissions pour les entreprises les plus polluantes.

Comment fonctionne le marché carbone ?

  • Quotas d’émission : Les entreprises reçoivent un certain nombre de quotas d’émission de CO2. Si elles émettent plus, elles doivent en acheter sur le marché. À l’inverse, si elles émettent moins, elles peuvent revendre leurs quotas excédentaires.
  • Prix du CO2 : Le prix de la tonne de carbone est déterminé par la loi de l’offre et de la demande. Plus les quotas se raréfient, plus leur coût augmente.

Avec des objectifs climatiques plus ambitieux, l’Union Européenne réduit progressivement le nombre de quotas disponibles, entraînant une flambée des prix. En 2023, le prix du CO2 a dépassé 100 €/tonne, contre environ 25 €/tonne en 2019.

Cette flambée du prix du CO2 s’explique principalement par l’envolée des prix du gaz en 2022, suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. L’augmentation des prix du gaz a poussé les entreprises à se tourner vers le charbon, une énergie bien plus émettrice de carbone.

Pourquoi le prix du carbone impacte-t-il le prix de l’électricité ?

Bien que la production d’électricité en France soit décarbonée à 90 %, grâce au nucléaire, le prix du CO2 influence les marchés européens. Voici pourquoi :

Mobilisation des centrales thermiques :

  • Lors des pics de consommation électrique, les centrales thermiques (fonctionnant au charbon ou au gaz) sont sollicitées pour équilibrer l’offre et la demande. Or, ces centrales émettent du CO2 et doivent acheter des quotas pour compenser leurs émissions.
  • Plus le prix des quotas CO2 augmente, plus le coût de production de l’électricité grimpe.
  • Ce surcoût est répercuté sur le prix final de l’électricité.

Interconnexion des énergies fossiles :

Les centrales au gaz sont moins émettrices de CO2 que celles au charbon. Ainsi, lorsque le prix du carbone augmente, les producteurs d’électricité privilégient le gaz. Cependant, une demande accrue fait également monter le prix du gaz, ce qui alourdit encore le coût de production.

Spéculation et régulation :

L’arrivée d’acteurs financiers, comme les fonds d’investissement, a renforcé la spéculation sur les quotas carbone, accentuant la hausse des prix.

Un équilibre fragile entre transition énergétique et coût de l’énergie

La hausse des prix du carbone présente un paradoxe :

  • Avantage environnemental : Un prix élevé du CO2 incite les entreprises à investir dans des solutions bas-carbone, comme les énergies renouvelables ou le nucléaire. Par exemple, entre 1990 et 2020, les émissions de GES ont baissé de 32 % en Europe.
  • Inconvénient économique : À court terme, cette hausse impacte les factures d’électricité des professionnels et des entreprises.

L’objectif de l’Union Européenne est ambitieux : réduire de 55 % les émissions de GES d’ici 2030 et atteindre la neutralité carbone en 2050. Toutefois, l’enjeu reste de trouver un équilibre pour éviter que cette transition pèse excessivement sur les consommateurs.

Comment réduire l’impact du marché carbone sur vos factures d’énergie ?

Face à la hausse des prix de l’électricité liée au marché carbone, des solutions existent pour maîtriser votre budget énergétique :

  • Investir dans des énergies renouvelables : L’autoconsommation via des panneaux photovoltaïques ou des solutions de géothermie permet de réduire jusqu’à 50 % les coûts énergétiques.
  • Optimiser la consommation : Mettre en place des systèmes de monitoring pour suivre et ajuster vos besoins en énergie en temps réel.
  • Choisir des offres d’énergie verte : Opter pour des contrats où l’électricité est issue de sources renouvelables peut vous permettre d’allier maîtrise des coûts et engagement environnemental.

L’évolution du marché et du prix du carbone en 2024

Le marché carbone continue d’être influencé par des facteurs économiques, climatiques et géopolitiques. En 2024, les prix des quotas de CO2 (EUA – European Union Allowances) connaissent des fluctuations marquées, impactant directement les coûts de production de l’électricité et donc les factures énergétiques des entreprises.

Un marché en perpétuelle évolution

Depuis le début de l’année, les prix du carbone oscillent entre 65 € et 75 €/t. Cette volatilité s’explique par plusieurs facteurs :

  • Demande variable : La baisse de l’activité industrielle en Europe, exacerbée par des ralentissements économiques, a temporairement réduit la demande de quotas d’émission.
  • Spéculation accrue : Le regain d’intérêt des investisseurs pour les quotas carbone, stimulé par des hausses du prix du gaz, a contribué à maintenir les prix à un niveau relativement élevé.
  • Politiques climatiques : L’Union Européenne, dans le cadre de sa stratégie Green Deal, continue de réduire progressivement l’offre de quotas afin d’accélérer la décarbonation.

Tendances marquantes de 2024

Hausse saisonnière et reprise industrielle

  • En novembre 2024, le contrat EUA pour décembre a franchi le seuil des 70 €/t après avoir atteint un plancher autour de 65 €/t en septembre. Cette hausse est liée à une anticipation d’une reprise de la production industrielle dans les secteurs énergivores comme la sidérurgie et la chimie.
  • Les tensions sur les prix du gaz, couplées à des besoins croissants d’ajustement électrique via les centrales thermiques, ont également accentué la demande de quotas CO2.

Facteurs baissiers temporaires

  • Durant l’été 2024, une surproduction d’électricité nucléaire en France a permis de limiter le recours aux centrales thermiques et, par conséquent, de réduire la demande en quotas CO₂.
  • La baisse d’activité industrielle dans certains pays européens a également exercé une pression à la baisse sur les prix.

Pression haussière structurelle

La politique européenne de réduction annuelle des quotas disponibles entraîne une raréfaction progressive de l’offre sur le marché carbone. Cette stratégie, combinée à l’introduction imminente du CBAM (mécanisme d’ajustement carbone aux frontières), maintient une tendance haussière sur le long terme.

Les implications pour les entreprises et le prix de l’électricité

L’évolution des prix du carbone en 2024 a des répercussions directes sur le marché de l’énergie :

  • Hausse des coûts de production : Les centrales thermiques, encore essentielles en période de pointe, doivent compenser leurs émissions de CO₂ en achetant des quotas, ce qui renchérit le coût de l’électricité.
  • Stratégies d’achat complexes : Face à la volatilité du marché, les entreprises soumises au SEQE-UE (Système d’Échange de Quotas d’Émission) doivent adapter leurs stratégies d’approvisionnement pour limiter l’impact financier.

Conclusion : un impact majeur à surveiller

Le marché carbone, en pleine évolution, joue un rôle central dans l’augmentation des prix de l’électricité. Si cette dynamique favorise la transition énergétique, elle soulève des défis économiques pour les entreprises. Comprendre ces mécanismes et anticiper les fluctuations du marché carbone devient indispensable pour optimiser sa stratégie énergétique.

Malgré ses contraintes économiques, le marché carbone reste un levier majeur pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Toutefois, l’équilibre entre des prix suffisamment élevés pour inciter à la décarbonation et un niveau supportable pour les entreprises demeure un défi majeur pour les années à venir.

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FAQ : Tout savoir sur le marché du carbone

Quand le marché européen du carbone a-t-il été créé ?

Le marché européen du carbone a été lancé le 1er janvier 2005. Il fait suite aux engagements du protocole de Kyoto, un accord international signé en 1997 pour réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Ce marché est devenu un pilier de la stratégie climatique de l’Union européenne.

Ce mécanisme s’applique principalement aux grandes industries et aux producteurs d’électricité, comme la sidérurgie, les raffineries, les cimenteries, ou encore les usines chimiques d’une puissance supérieure à 20 mégawatts.
Depuis 2012, le secteur de l’aviation est aussi concerné, mais uniquement pour les vols intra-européens. Des extensions sont prévues pour inclure le transport maritime, le chauffage des bâtiments et le transport routier dans les années à venir.

Le marché du carbone vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre en incitant financièrement les entreprises à diminuer leur impact environnemental. Chaque tonne de CO₂ émise doit être couverte par un quota. Plus le prix de ces quotas augmente, plus les entreprises ont intérêt à réduire leurs émissions. L’objectif de l’UE est une baisse des émissions de 55 % d’ici 2030, par rapport aux niveaux de 1990, et une neutralité carbone en 2050.

Chaque année, l’Union européenne fixe un plafond pour les émissions totales de CO₂. Les entreprises reçoivent des quotas pour couvrir une partie de leurs émissions. Si elles en manquent, elles peuvent en acheter via des enchères ou sur le marché secondaire. À l’inverse, si elles en ont en surplus, elles peuvent les revendre ou les conserver pour plus tard.
Ce système encourage les entreprises à réduire leurs émissions pour éviter d’acheter des quotas supplémentaires, ou pour générer des revenus en revendant leurs surplus. En cas de non-respect, une amende de 100 € par tonne excédentaire est appliquée.

Les quotas sont principalement vendus aux enchères via une plateforme européenne appelée European Energy Exchange (EEX). Cependant, certaines industries très exposées à la concurrence internationale reçoivent encore des quotas gratuits pour éviter les délocalisations. Par exemple, en 2020, environ 837 millions de quotas ont été attribués gratuitement, notamment dans les secteurs de l’acier et du ciment.

Le prix des quotas est déterminé par l’offre et la demande. Lorsque les quotas deviennent rares, leur prix augmente. L’Union européenne diminue progressivement le plafond des quotas disponibles chaque année, afin d’encourager les entreprises à réduire leurs émissions. Ces ajustements ont fait grimper le prix de la tonne de CO2, passant de 5 € en 2014 à plus de 80 € fin 2021, avec des pics encore plus élevés en raison de la spéculation et de la crise énergétique.

L’Union européenne prévoit d’étendre le marché du carbone à de nouveaux secteurs, comme le transport maritime et le chauffage des bâtiments. Elle introduira également un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM) en 2026, qui imposera un prix du carbone sur certaines importations pour protéger les entreprises européennes face à la concurrence internationale.

Le marché a gagné en efficacité ces dernières années grâce à des réformes visant à réduire le surplus de quotas disponibles. Si le secteur de l’électricité a réussi à diminuer ses émissions, le système reste moins performant pour l’industrie, qui bénéficie encore de quotas gratuits. La réforme continue pour rendre le marché plus incitatif et atteindre les objectifs climatiques européens.

Oui, plusieurs régions ont développé des marchés carbone. La Chine a lancé le sien en 2021, qui couvre actuellement son secteur électrique. Les États-Unis disposent aussi de systèmes régionaux. En 2021, on recensait 21 marchés carbone dans le monde, chacun ayant des règles et des objectifs propres.