Biogaz en France : un essor prometteur face à des défis majeurs

Biogaz en France : un essor prometteur face à des défis majeurs

Le biogaz joue un rôle clé dans la transition énergétique de la France. Issu de la fermentation de matières organiques, il permet de produire une énergie renouvelable en phase avec les objectifs de décarbonation du pays. Massivement soutenue ces dernières années, cette filière a bénéficié d’importants financements publics. Pourtant, un récent rapport de la Cour des comptes met en avant les défis et les risques liés à son développement, notamment en termes de coût pour les finances publiques et d’impact économique.

Un secteur en plein développement

Grâce aux aides publiques, la filière biogaz a connu un essor notable. En 2023, la France comptait 1 911 unités de méthanisation, témoignant du dynamisme de cette technologie. La production d’électricité issue du biogaz s’élevait à 3 TWh, couvrant 0,7 % de la consommation nationale, tandis que l’injection de biométhane atteignait 9,1 TWh, soit 2,4 % des besoins en gaz du pays.

Cette tendance devrait s’accentuer avec la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE3), qui ambitionne de porter la production à 50 TWh d’ici 2035. Un objectif ambitieux qui nécessitera des investissements considérables.

Un soutien public massif et coûteux

La croissance du biogaz en France repose sur un système de financement public généreux, combinant tarifs d’achat, subventions à l’investissement et avantages fiscaux. Entre 2011 et 2022, ces mécanismes ont engendré une dépense publique de 2,6 milliards d’euros. Et les coûts ne cessent d’augmenter : la Commission de régulation de l’énergie estime que l’injection du biométhane dans le réseau coûtera 1,2 milliard d’euros en 2025.

Sur les douze prochaines années, les engagements actuels pourraient représenter entre 22 et 27 milliards d’euros pour les finances publiques. La Cour des comptes souligne que le biométhane est l’une des sources d’énergie les plus coûteuses en termes de soutien par mégawattheure, posant la question de la soutenabilité de cette stratégie.

Un virage vers l’industrialisation ?

Face à ces coûts croissants, la France s’oriente vers un nouveau modèle de financement basé sur les certificats de production de biogaz. Ce mécanisme transfère la charge financière du contribuable vers le consommateur de gaz. Toutefois, la Cour des comptes met en garde contre le risque d’une concentration du marché entre quelques grands acteurs, comme Engie et TotalEnergies, ce qui pourrait limiter la concurrence et entraîner une hausse des prix.

De plus, ce mode de financement favorise les grandes unités industrielles, marquant une rupture avec le modèle agricole actuel. Si cette évolution permet de réduire la dépendance aux subventions publiques, elle risque de fragiliser les agriculteurs, principaux bénéficiaires du système actuel.

Des tensions sur la biomasse

L’un des défis majeurs de la filière est l’approvisionnement en matières premières. Pour atteindre les objectifs de 2030, il faudra mobiliser davantage de biomasse, ce qui pourrait générer des conflits d’usage avec la production alimentaire et les biocarburants. La Cour estime que 15 TWh sur les 50 prévus d’ici 2030 sont menacés par un manque de ressources.

Quel avenir pour la filière ?

Pour assurer un développement équilibré du biogaz, la Cour des comptes recommande plusieurs mesures, dont :

  • Une révision du soutien aux installations de cogénération, dont l’efficacité économique est contestée.
  • Une mise à jour de la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse.
  • Un suivi des effets de la méthanisation sur l’évolution des pratiques agricoles.

De plus, la décarbonation du gaz implique une réduction de sa consommation de 66 % d’ici 2050. Cette baisse pourrait entraîner une augmentation des tarifs de distribution, pesant sur les factures des consommateurs. La Cour des comptes alerte ainsi sur une possible flambée des prix, notamment si le coût du biométhane reste supérieur à 100 €/MWh, bien au-dessus de celui pratiqué au Danemark (60 à 70 €/MWh).

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En résumé

Si le biogaz représente une opportunité indéniable pour la transition énergétique, son développement pose de nombreuses questions en matière de coût, d’industrialisation et de disponibilité des ressources. La France devra trouver un équilibre entre soutien public, viabilité économique et respect des objectifs environnementaux pour assurer un avenir durable à cette filière prometteuse.