Le marché carbone européen, également connu sous le nom de système d’échange de quotas d’émissions, a été mis en place en 2005. Il s’agit d’un mécanisme qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre des secteurs industriels et de production d’électricité, et à favoriser la transition vers une économie plus verte. Au fil des années, le marché carbone européen a connu plusieurs évolutions et ajustements pour mieux répondre aux défis environnementaux actuels. En effet, le mardi 25 avril 2023, les Vingt-Sept ont ouvert la voie à l’entrée en vigueur de la réforme du marché carbone, pilier du plan climat de l’UE.
La réforme européenne du marché carbone adoptée
Déjà votée il y a quelques semaines par les députés européens, la réforme du marché carbone a définitivement été adoptée le mardi 25 avril par les Vingt-Sept. Ils ont ainsi voté en faveur de plusieurs textes législatifs clés faisant partie du plan « Fit for 55 » de l’Union européenne. Ce plan vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990, conformément à la loi européenne sur le climat. La réforme comprend la mise en place du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, la création d’un nouveau fonds social pour le climat, ainsi que l’extension du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) à de nouveaux secteurs.
L'accélération du rythme de réduction des quotas
La réforme implique une accélération du rythme de réduction des quotas proposés. D’ici 2030, les quotas devront baisser de 62% par rapport à 2005, contre un objectif antérieur de 43 %. Les entreprises industrielles concernées devront réduire automatiquement leurs émissions en conséquence. De plus, le marché carbone s’étendra aux émissions du secteur maritime et de l’aviation. Progressivement, les quotas gratuits accordés au secteur de l’aviation seront supprimés d’ici 2026, ce qui encouragera l’utilisation de carburants d’aviation durables. A partir de 2028, il devrait s’étendre aux sites d’incinération de déchets, sous réserve d’une étude favorable de Bruxelles.
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM en anglais) n’est pas une taxe, mais un dispositif inédit qui appliquera aux importations des Vingt-Sept les mêmes critères que ceux du marché européen du carbone, où les entreprises européennes doivent acheter des quotas pour couvrir leurs émissions polluantes. Le but de ce mécanisme est de stimuler les pays tiers à accroître leurs efforts en matière de lutte contre le changement climatique et de veiller à ce que les initiatives de l’Union Européenne et de la planète ne soient pas compromises par la délocalisation de la production de l’UE vers des pays ayant des politiques environnementales moins ambitieuses. Le dispositif visera les secteurs les plus polluants (acier, aluminium, fer, ciment, engrais, électricité). L’importateur de ces produits devra déclarer les émissions liées au processus de production et, si elles dépassent la norme européenne, devra acheter un certificat d’émission au prix du CO2 en vigueur dans l’UE. Si le pays exportateur possède un marché carbone, l’importateur paiera seulement la différence.
Les recettes attendues, qui pourraient atteindre plus de 14 milliards d’euros par an, contribueront au budget général de l’UE. Une période d’essai débutera en octobre 2023, au cours de laquelle les importateurs devront simplement signaler leurs obligations. Au fur et à mesure que la taxe carbone aux frontières prendra de l’ampleur – entre 2026 et 2034 – l’Union Européenne supprimera progressivement les quotas d’émissions gratuits accordés aux entreprises européennes pour faire face à la concurrence extra-européenne.
Enfin, la Commission européenne a indiqué dans son communiqué que “Dorénavant, les États-membres devront consacrer l’intégralité de leurs revenus d’échange de quotas d’émissions à des projets liés au climat et à l’énergie, et traiter les aspects sociaux de la transition, en complément des dépenses climatiques prévues dans le budget de l’UE”.
L'élargissement du système de quotas aux ménages
Une autre évolution est en cours concernant le chauffage des bâtiments et les carburants routiers, pour lesquels un deuxième marché carbone est prévu. Cependant, cette initiative a suscité des débats, car elle implique que les ménages devront également payer un prix pour le CO2 lié au carburant et au chauffage à partir de 2027. Le texte prévoit toutefois un plafonnement de ce prix à 45 euros par tonne, au moins jusqu’en 2030, et un report de l’entrée en vigueur à 2028 si la hausse actuelle des prix de l’énergie se poursuivait.
L’UE souhaite, cependant, contrebalancer cette mesure en instituant un Fonds social pour le climat (FSC). Ce fonds social serait doté de 86,7 milliards d’euros et devrait être créé en 2026 afin d’aider les microentreprises et les ménages vulnérables dans leur transition énergétique. Les principales ressources de ce fonds proviendront des recettes générées par le nouveau marché du carbone. Le FSC sera utilisé pour financer des mesures temporaires de soutien direct aux revenus, telles que l’augmentation des prix du transport routier et du chauffage, ainsi que pour des investissements à long terme, comme l’intégration des énergies renouvelables, la rénovation des bâtiments ou encore l’utilisation des transports publics et des services de mobilité partagée.
L'impact du prix du carbone sur le prix de l’énergie
Le marché de l’électricité et du gaz est impacté par l’évolution du prix du carbone. En effet, le coût de production des centrales thermiques, utilisées lors des pics de consommation, est influencé par le prix du CO2. Les producteurs, qui utilisent du gaz ou du charbon pour produire de l’électricité, vont naturellement privilégier la source la moins coûteuse. Lorsque le prix du carbone est élevé, il est préférable d’utiliser le gaz plutôt que le charbon, qui a une plus grande émission de CO2, ce qui entraîne une augmentation de la demande et donc du prix du gaz.