Avec une production nucléaire en plein essor et une demande nationale en baisse, la France s’apprête à franchir un nouveau cap historique en matière d’exportations d’électricité. En 2024, le pays prévoit d’exporter entre 85 et 90 térawattheures (TWh) d’électricité vers ses voisins européens, une performance notable qui dépasse le précédent record de 77 TWh atteint en 2002.
Le rebond du nucléaire et des énergies renouvelables, moteurs de l’exportation
Cette année, la reprise du parc nucléaire français se traduit par une production estimée entre 340 et 360 TWh, un volume bien supérieur à celui de 2022, année marquée par la crise de corrosion sous contrainte. Cette crise avait contraint EDF à réduire sa production, transformant temporairement la France en importatrice nette d’électricité. Avec la situation désormais stabilisée, la France est non seulement revenue à des niveaux de production élevés, mais elle bénéficie également d’un parc renouvelable en croissance. Ce cumul de sources de production permet à la France de proposer des tarifs compétitifs sur les marchés européens, notamment pour des pays comme l’Allemagne, l’Italie et le Benelux, où les prix de gros sont plus élevés.
Une demande intérieure en baisse favorise les exportations
La faiblesse de la demande d’électricité en France contribue également à ces exportations records. Depuis le début de l’année, la consommation nationale d’électricité s’est stabilisée autour de 400 TWh, soit environ 8 à 10 % de moins que les prévisions de 2019. Ce recul s’explique par plusieurs facteurs, dont le ralentissement de la vente de véhicules électriques, des difficultés dans le processus de réindustrialisation, et la persistance des écogestes adoptés en période de crise énergétique.
Une performance économique pour la balance commerciale, mais un signal mitigé pour l’électrification des usages
La hausse des exportations d’électricité est une excellente nouvelle pour la balance commerciale de la France, qui se distingue rarement par des exportations dans le domaine de l’énergie. Cependant, cette performance traduit aussi un manque de dynamisme dans l’activité industrielle et l’électrification des usages en France. Alors que le gouvernement ambitionne une forte électrification des transports et de l’industrie, la demande intérieure reste insuffisante pour absorber la production nationale.
Des perspectives de croissance avec l’essor des centres de données et de la mobilité électrique
EDF reste optimiste quant à une future hausse de la demande intérieure, notamment avec le développement des véhicules électriques et l’implantation de centres de données à forte consommation énergétique. D’ici 2035, EDF prévoit que la demande en électricité augmentera de 150 TWh, avec 70 TWh dédiés aux transports, 60 TWh à l’industrie, et entre 20 et 30 TWh aux data centers. Ces infrastructures, notamment les data centers, nécessiteront des connexions de haute puissance équivalentes à celles de réacteurs nucléaires.
La France est en voie de battre un record historique d’exportation d’électricité, porté par le retour en force de son parc nucléaire, l’essor des énergies renouvelables et une demande intérieure en recul. Si cette situation bénéficie aux échanges commerciaux, elle met en lumière le défi auquel fait face la France : stimuler la demande nationale pour accompagner les objectifs d’électrification et soutenir la transition énergétique des entreprises et des ménages.