Dans la vallée de la Bresle, haut lieu de la tradition verrière en Normandie, une transformation majeure touche aujourd’hui la production de verre. À Hodeng-au-Bosc, la verrerie Pochet du Courval, fournisseur historique des grandes maisons de parfum (Chanel, Dior, Lancôme…), franchit un cap décisif vers la décarbonation de l’industrie du verre.
Depuis le début de l’année 2025, l’un des trois fours à gaz du site a été remplacé par un four électrique alimenté en électricité bas carbone. Il s’agit du premier four électrique en France dédié au flaconnage de luxe, marquant une avancée majeure dans la transition énergétique du secteur verrier.
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Un four électrique bas carbone au service de la performance industrielle
Fondu à 1.400°C, le verre est un matériau qui demande une énorme dépense énergétique. Traditionnellement, cette chaleur est générée par le gaz, une source fossile fortement émettrice de CO2. Le nouveau four électrique de Pochet offre une alternative plus durable :
- Consommation énergétique divisée par deux
- Capacité de production augmentée : 66 tonnes de verre par jour contre 50 pour un four à gaz
- Une diminution notable des émissions liées à la combustion
La mise en place de cette innovation a demandé 7 mois de travaux et 12.000 heures de formation pour en assurer la prise en main. « Le gaz chauffe vite et fort, mais refroidit vite », tandis que l’électricité « chauffe fort, lentement et refroidit lentement », précise Benoît Marszalek, directeur des opérations chez Pochet du Courval.
Grâce à cette technologie, le site peut continuer à produire 1 million de flacons de parfum par jour, tout en réduisant son impact environnemental.
L'industrie du verre, un secteur en pleine mutation
Le secteur de la verrerie est responsable d’environ 3 % des émissions de gaz à effet de serre liées à l’industrie en France, avec en moyenne 500 kg de CO2 émis pour chaque tonne de verre produite. Dans un contexte où la transition écologique devient une priorité, il est essentiel pour les acteurs du secteur de repenser leurs méthodes de production.
Engagée dans cette démarche, la verrerie Pochet intègre déjà 15 % de verre recyclé dans ses fabrications. Elle s’est également fixé un objectif ambitieux : réduire de moitié ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2033, en prenant 2014 comme année de référence.
Un investissement audacieux au service de la compétitivité
La mise en place d’un four électrique a représenté un investissement conséquent, estimé à 40 millions d’euros, dont 6 millions ont été couverts par des subventions publiques. Malgré un contexte énergétique tendu, marqué par la guerre en Ukraine et la hausse des prix, l’entreprise a choisi d’avancer avec détermination vers une production plus durable.
Pour sécuriser ses coûts, l’entreprise a signé un contrat d’achat d’électricité avec une centrale solaire, garantissant des prix plus stables. Cependant, cela ne couvre pas encore l’intégralité des besoins du site en énergie propre.
Le directeur général de Pochet, Xavier Gagey, plaide pour un tarif de l’électricité plus compétitif pour les entreprises engagées dans la décarbonation. Il alerte sur la pression exercée par les concurrents asiatiques et américains, qui bénéficient de prix de l’énergie bien plus bas.
Le flaconnage de luxe, symbole d’un avenir plus vert
Le choix de l’électricité verte dans un secteur aussi exigeant que le flaconnage de luxe envoie un signal fort. Il démontre que l’innovation industrielle peut rimer avec développement durable.
En répondant aux nouvelles attentes des grandes marques, la verrerie Pochet montre que l’industrie du luxe peut être actrice de la transition énergétique, sans compromis sur la qualité ou l’esthétique.