Charbon : EDF envisage d’abandonner le projet de reconversion de la centrale de Cordemais

La France, bien que tournée vers une transition énergétique depuis plusieurs années, fait face à des défis complexes dans sa volonté de fermer ses dernières centrales à charbon.

EDF a récemment exprimé son intention de renoncer à la reconversion de la centrale à charbon de Cordemais (Loire-Atlantique) vers une production basée sur la biomasse, dans le cadre du projet Ecocombust 2. Cette décision, relayée par la CGT dans un communiqué, a suscité une vive réaction, notamment de la part des acteurs locaux et de deux sénateurs du département.

Ce choix marque un tournant dans la politique énergétique française, notamment en raison de l’échec des tentatives de conversion à la biomasse. Revenons sur les raisons de cet abandon et ses implications pour l’avenir.

La fermeture retardée des centrales à charbon françaises

Depuis 2015, la France avait exprimé son intention de fermer ses trois dernières centrales à charbon, avec une échéance initialement fixée à 2022. Cependant, la crise énergétique mondiale et des difficultés politiques et économiques ont repoussé cette fermeture à 2027. Contrairement à d’autres pays comme le Royaume-Uni, qui ont réussi à tourner la page du charbon, la France a rencontré des obstacles majeurs.

Ces fermetures ne sont pas liées à une dépendance énergétique, car les centrales au charbon ne jouent qu’un rôle marginal dans l’approvisionnement en électricité du pays. Toutefois, les conséquences sociales et économiques, notamment la perte d’emplois, ont compliqué le processus. La centrale de Cordemais en Loire-Atlantique est un exemple emblématique de cette situation, avec près de 350 employés concernés. Le projet de reconversion à la biomasse, porté depuis plusieurs années, semblait être une solution, mais son possible abandon ravive les inquiétudes.

Ecocombust : un projet de reconversion ambitieux, mais coûteux

Depuis 2015, EDF étudie la possibilité de convertir la centrale de Cordemais, l’une des dernières à fonctionner au charbon en France, afin d’aligner ses activités avec les objectifs nationaux de transition énergétique. Le projet Ecocombust avait pour but de remplacer le charbon par des granulés de biomasse, issus principalement de déchets de bois de classe B. Ce projet devait non seulement contribuer à la réduction des émissions de CO₂, mais aussi permettre à la centrale de continuer à produire de l’électricité, tout en s’inscrivant dans une logique de “décarbonation progressive“.

La biomasse, bien qu’une alternative prometteuse, a montré ses limites dans ce contexte particulier. Plusieurs obstacles ont ralenti l’avancement du projet. Premièrement, les coûts associés à la mise en œuvre du projet se sont avérés beaucoup plus élevés que prévu. EDF et ses partenaires, notamment Paprec, ont rencontré des difficultés économiques, ce qui a mené à des discussions infructueuses. Deuxièmement, les besoins du réseau électrique ont évolué vers des solutions dites « d’hyperpointe », des centrales capables de fournir de l’énergie rapidement en cas de forte demande. Or, une centrale biomasse met entre 24 et 48 heures pour atteindre son plein potentiel, ce qui la rend incompatible avec ces nouveaux besoins.

Le projet a également souffert de l’absence de soutien clair de l’État, tant sur le plan industriel qu’économique. Sans ce soutien, EDF a décidé de mettre fin à ses efforts de reconversion, laissant planer le doute sur l’avenir des employés et de l’installation elle-même.

La fin de la production à Cordemais d'ici 2027

EDF a annoncé à la CGT son intention de mettre fin à la production de la centrale de Cordemais en 2027, laissant entrevoir la fermeture définitive du site. Cette nouvelle a été perçue comme prématurée par les syndicats, qui rappellent les efforts déployés depuis plusieurs années pour adapter la centrale aux nouvelles exigences environnementales.

En mai 2022, EDF avait pourtant relancé le projet de conversion à la biomasse après une première tentative avortée en 2021. Mais malgré la relance du projet, les avancées n’ont pas été suffisantes pour garantir une viabilité à long terme. En 2023, la décarbonation progressive du site a démarré, mais avec cette nouvelle annonce, l’avenir de Cordemais reste incertain.

Les perspectives pour Cordemais et les autres centrales à charbon

Alors que le président Emmanuel Macron avait annoncé en septembre 2023 que les dernières centrales à charbon du pays, y compris Cordemais et Saint-Avold (Moselle), seraient converties à la biomasse d’ici 2027, cette nouvelle remet en cause cet engagement.

EDF envisage donc une autre option : la construction d’une usine de production de tuyauterie nucléaire sur le site de Cordemais, en partenariat avec sa filiale Framatome. Ce projet, bien que promettant la création d’environ 200 emplois, est très différent du rôle initial de la centrale et ne compensera pas totalement les pertes en termes d’emplois et d’activité.

Quant aux autres centrales à charbon françaises, la situation reste complexe. À Saint-Avold, en Moselle, GazelEnergie, propriétaire de la centrale, a lui aussi renoncé à une conversion à la biomasse. À la place, l’entreprise propose une transition vers le gaz, arguant que cette solution, combinée à l’utilisation de biogaz, permettrait de réduire les émissions tout en maintenant une production électrique fiable. Cependant, ce projet doit encore être validé par les pouvoirs publics, qui, à ce stade, n’ont pas intégré la construction de nouvelles centrales à gaz dans leur feuille de route énergétique.

Un échec aux répercussions politiques et économiques

Le renoncement à la biomasse à Cordemais, et plus largement la difficulté de fermer les centrales à charbon, met en lumière les défis auxquels la France est confrontée dans sa transition énergétique. Si l’objectif est de réduire les émissions de gaz à effet de serre, la planification et la mise en œuvre de cette transition restent des sujets délicats. Les emplois liés à l’énergie fossile, notamment dans des régions déjà fragilisées économiquement, compliquent davantage la prise de décision.

Ce dossier est aussi une source de tensions politiques. La CGT, tout comme plusieurs sénateurs, a exprimé son mécontentement face à ce qu’ils considèrent comme un manque de stratégie de l’État en matière de développement des énergies renouvelables. La fermeture de sites comme Cordemais, combinée à l’abandon de projets innovants comme Ecocombust, démontre une certaine incapacité à concilier transition énergétique et développement industriel local.

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En résumé

Le projet de conversion de la centrale de Cordemais en une unité biomasse représentait une étape clé dans la sortie progressive des énergies fossiles en France. Son abandon marque un revers pour EDF, mais aussi pour la politique énergétique du pays. Alors que la fermeture de la centrale est prévue pour 2027, de nombreuses questions restent en suspens, notamment sur la manière dont la France va assurer la sécurité de son réseau électrique tout en respectant ses engagements environnementaux. Il reste à voir si les alternatives proposées, telles que le gaz ou le nucléaire, parviendront à répondre aux attentes tant en termes de production que d’impact environnemental.

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