L’Union européenne engage un nouveau bras de fer avec la Chine, en se lançant dans une nouvelle enquête sur les subventions accordées aux fabricants chinois d’éoliennes. En effet, après les secteurs de l’automobile et des panneaux solaires, Bruxelles soupçonne les fabricants chinois d’éoliennes d’avoir touché des subventions faussant la concurrence sur le marché européen.
« Nous lançons une nouvelle enquête sur les fournisseurs chinois d’éoliennes. Nous étudions les conditions de développement de parcs éoliens en Espagne, en Grèce, en France, en Roumanie et en Bulgarie », a déclaré Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la Concurrence, lors d’un discours à l’Université de Princeton dans le New Jersey.
Cette enquête intervient dans un contexte de tensions commerciales avec la Chine. Elle s’inscrit également dans le cadre de nouvelles règles européennes, mises en application mi-2023, visant à bloquer les subventions accordées par des pays tiers qui pourraient fausser l’équilibre concurrentiel lors des procédures d’appel d’offres.
Cela met donc en lumière la volonté de Bruxelles de protéger l’industrie européenne contre des pratiques commerciales jugées déloyales.
Une réponse à la distorsion de la concurrence
Cela fait plusieurs mois que les fabricants européens d’éoliennes demandent à Bruxelles de prendre des mesures afin de protéger le secteur.
Bien que moins présents sur le marché européen, les fabricants chinois concurrencent déjà les leaders européens de l’éolien sur d’autres marchés étrangers, comme en Amérique du Sud. Ils tirent parti d’économies d’échelle, facilitées par l’ampleur de leur marché intérieur et par les enjeux financiers auxquels sont confrontés les acteurs occidentaux.
Jusqu’en 2020, l’Europe dominait le classement mondial de la production d’énergie éolienne, mais ces dernières années, la Chine a intensifié son expansion dans ce domaine. À la fin de l’année 2023, elle représentait presque la moitié de la capacité éolienne installée à l’échelle mondiale.
Selon WindEurope, le lobby européen de l’industrie éolienne, les éoliennes provenant de Chine sont proposées sur le marché de l’Union européenne à des prix jusqu’à 50 % inférieurs à ceux de leurs homologues européens. Giles Dickson, le directeur général de l’organisation, insiste sur le fait que de tels prix bas ne sont réalisables qu’avec le soutien de subventions publiques, et il a exprimé son approbation face à l’initiative d’enquête. De son côté, la Chambre de commerce chinoise au sein de l’UE a critiqué cette démarche, la qualifiant « d’acte de coercition économique » et accuse l’UE d’introduire sans cesse de nouveaux dispositifs réglementaires visant les entreprises chinoises.
Lors de son intervention à l’Université de Princeton, Margrethe Vestager a accusé la Chine d’avoir réussi à dominer l’industrie des panneaux solaires, « accordant des subventions massives à ses fournisseurs nationaux, tout en fermant simultanément et progressivement le marché chinois aux entreprises étrangères ». La commissaire a souligné que la Chine compense son ralentissement économique interne en vendant à l’étranger à des prix réduits. Elle a précisé que l’objectif des actions de l’UE n’est pas de freiner la réussite économique de la Chine, mais de réinstaurer une certaine justice dans les échanges commerciaux internationaux.
La Chine très inquiète
La réponse de la Chine à cette enquête ne s’est pas faite attendre. Mao Ning, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a critiqué l’approche protectionniste de l’Union européenne, affirmant qu’elle ne résout pas les problèmes internes de l’UE et qu’elle entraîne des conséquences négatives sur plusieurs fronts. Pour la Chine, il s’agit de mesures discriminatoires prises par l’Europe contre les entreprises et industries chinoises.
Elle a demandé à l’Europe de respecter les principes de l’OMC et du libre marché, tout en soulignant que la Chine défendrait avec vigueur les droits de ses entreprises. Cette position fait écho aux préoccupations exprimées par la Chambre de commerce chinoise dans l’UE, qui voit dans les actions européennes une forme de pression économique et une série d’obstacles ciblés contre les entreprises chinoises.
Dans un autre cadre réglementaire, l‘UE envisage d’augmenter les droits de douane sur les voitures électriques chinoises, accusées d’être vendues à des prix injustement bas grâce à des subventions publiques.
L’enquête de l’Union européenne sur les subventions aux fabricants chinois d’éoliennes est plus qu’une mesure réglementaire. Elle souligne l’importance de maintenir des conditions de marché équitables pour garantir la viabilité et la compétitivité de l’industrie éolienne européenne. De plus, elle reflète l’engagement de l’UE de soutenir la transition énergétique dans un cadre de marché équilibré, où les innovations et les investissements dans les énergies renouvelables peuvent prospérer sans être faussés par des interventions publiques injustes.